Je l'ai apprécié, il interroge chacun.e de nous
Le grand marché
Il attire il attire, c’est fou le monde qu’il attire... le grand marché des
certitudes:
"C’est certain il y aura un rebond. Après le covid 19 le monde aura changé
vous verrez! Moi je suis sûr tout redeviendra comme avant. Nous serons
tous marqués psychologiquement! Une crise comme celle-ci va changer
notre mode de vie. Et les entreprises? 50% vont disparaître! Les voyages
en avion? Tu oublies! De toute façon on va droit dans le mur! Des crises, il
y en aura encore je n’ai aucun doute là-dessus...etc..."
- Et vous , madame, vous en pensez quoi?
- Moi, je n’ai aucune certitude. Enfin ...si...une.
- C’est pas beaucoup ça ...
- Les certitudes, c’est très lourd à porter
- ?
- Toutes ces assertions... Chercher à maîtriser...contrôler...Pour le plaisir
d’avoir raison. Résultat : orgueil...arrogance...ou au contraire dépit...
désillusion... Marcher sa vie avec de telles pierres dans son sac à dos!
Je suis plutôt du genre à laisser les portes ouvertes à tous les possibles.
- Vous en avez pourtant...une?
- Une seule. Celle de mourir. C’est un fardeau léger.
- ?!!! Pas trop vite quand même...
- Pas nécessairement...
- ?
- Le “comment” m’importe davantage.
Le soir tombe.
Je repars d’un pas lent avec mon unique certitude.
Et la prière du poète :
«Seigneur, donne à chacun sa propre mort… » R. M. Rilke
O mon Dieu, donne à chacun sa propre mort,
donne à chacun la mort née de sa propre vie
où il connut l'amour et la misère.
Car nous ne sommes que l'écorce, que la feuille,
mais le fruit qui est au centre de tout
c'est la grande mort que chacun porte en soi.
C'est pour elle que les jeunes filles s'épanouissent,
et que les enfants rêvent d'être des hommes
et que les adolescents font des femmes leurs confidentes
d'une angoisse que personne d'autres n'accueille.
C'est pour elle que toutes les choses subsistent éternellement
même si le temps a effacé le souvenir,
et quiconque dans sa vie s'efforce de créer,
enclôt ce fruit d'un univers qui tour à tour le gèle et le réchauffe.
Dans ce fruit peut entrer toute la chaleur
des coeurs et l'éclat blanc des pensées ;
mais des anges sont venus comme une nuée d'oiseaux
et tous les fruits étaient encore verts.
Seigneur, nous sommes plus pauvres que les pauvres bêtes
qui, même aveugles, achèvent leur propre mort.
Oh, donne nous la force et la science
de lier notre vie en espalier
et le printemps autour d'elle commencera de bonne heure.