"Il n'y a pas de proverbe qui dise: "C'est dans le bonheur qu'on apprend à prier". Une telle action de grâce devrait pourtant s'élever d'elle-même, spontanément, comme le parfum de l'encens. Mais ce ne sont là que spéculations. Notre langue (l'allemand, mais c'est la même chose en français*) a raison de rapprocher les mots "prier" et "quémander"
Extrait de Une femme à Berlin, journal d'une anonyme
L'homme n'aurait-il besoin de Dieu que dans ses chagrins, au coeur de ses catastrophes?
Et de quel Dieu a-t-il besoin alors?
Est-ce une faiblesse d'avoir besoin d'un Dieu qui délivre du méchant, qui répare les dégâts, qui accompagne dans un quotidien douloureux ?
Dans le temps je priais.
Action de grâce, demande, simple mise en présence.
Ma prière était une relation à quelqu'un. Au fond de moi, je me sentais reliée à ce quelqu'un. Je lui parlais. Non pas spécialement assise dans l'ombre froide d'une église, mais simplement dans le présent de ma vie. Au volant. En cuisinant. En marchant. Souvent.
Je parlais surtout à l'Esprit, l'esprit qui souffle, anime, rend vivant. Chaque fois que je perdais le fil avec la vie vivante, chaque fois que je me sentais hors de ma vie, perdue sur des chemins sans issue, je priais le Souffle, je me reconnectais. Vais-je dire que je ressuscitais? oui, en quelque sorte... Reprendre confiance, c'est revenir à l'autre, à la vie en général, à ma vie en particulier..
Aujourd'hui, je ne prie plus. Rien. Néant. L'absence a remplacé la présence.
Je ne me comprends pas moi-même. Je ne sais pas où j'ai abandonné le fil, ni quand exactement, à la suite de quel événement je me suis dit que c'était fini, que l'absence n'était que l'absence. Rien que l'absence. Absolue. Vide .
Et pourtant en moi "cela" vibre toujours. De la même intense façon. Plus que jamais. Il y a urgence, puisque demain m'échappe. Le désir de vivre, l'élan vers l'autre, vers ce qui est beau, vers l'écoute profonde de l'autre, la parole nourrissante sont là, plus que jamais. Étincelles parfois fulgurantes, parfois légères comme un effleurement amoureux, parfois profondes comme des sillons qui se sont marqués dans un chemin détrempé... Étincelles vivaces si bonnes à vivre.
Est-ce que cela me suffit? Ai-je la nostalgie de ce qui fut? Je ne sais.
Mais parfois je m'adresse en moi au souffle que je ressens venir du plus profond de moi...
Rien qu'une large respiration, qui m'entraine loin...
Et de quel Dieu a-t-il besoin alors?
Est-ce une faiblesse d'avoir besoin d'un Dieu qui délivre du méchant, qui répare les dégâts, qui accompagne dans un quotidien douloureux ?
Dans le temps je priais.
Action de grâce, demande, simple mise en présence.
Ma prière était une relation à quelqu'un. Au fond de moi, je me sentais reliée à ce quelqu'un. Je lui parlais. Non pas spécialement assise dans l'ombre froide d'une église, mais simplement dans le présent de ma vie. Au volant. En cuisinant. En marchant. Souvent.
Je parlais surtout à l'Esprit, l'esprit qui souffle, anime, rend vivant. Chaque fois que je perdais le fil avec la vie vivante, chaque fois que je me sentais hors de ma vie, perdue sur des chemins sans issue, je priais le Souffle, je me reconnectais. Vais-je dire que je ressuscitais? oui, en quelque sorte... Reprendre confiance, c'est revenir à l'autre, à la vie en général, à ma vie en particulier..
Aujourd'hui, je ne prie plus. Rien. Néant. L'absence a remplacé la présence.
Je ne me comprends pas moi-même. Je ne sais pas où j'ai abandonné le fil, ni quand exactement, à la suite de quel événement je me suis dit que c'était fini, que l'absence n'était que l'absence. Rien que l'absence. Absolue. Vide .
Et pourtant en moi "cela" vibre toujours. De la même intense façon. Plus que jamais. Il y a urgence, puisque demain m'échappe. Le désir de vivre, l'élan vers l'autre, vers ce qui est beau, vers l'écoute profonde de l'autre, la parole nourrissante sont là, plus que jamais. Étincelles parfois fulgurantes, parfois légères comme un effleurement amoureux, parfois profondes comme des sillons qui se sont marqués dans un chemin détrempé... Étincelles vivaces si bonnes à vivre.
Est-ce que cela me suffit? Ai-je la nostalgie de ce qui fut? Je ne sais.
Mais parfois je m'adresse en moi au souffle que je ressens venir du plus profond de moi...
Rien qu'une large respiration, qui m'entraine loin...
Vous avez mis en mots aimables une expérience semblable à la mienne, sauf que moi, je sais quand j'ai arrêté de prier: face à trop de douleur et d'injustice. Pour moi, toujours révoltée, ne reste que la question: Que faisait Dieu à Auschwitz?
RépondreSupprimerJe me reconnais quand tu dis qu'il t'arrivait de prier en pensant à quelqu'un (ou quelque chose)... La religion, la croyance, je les respecte même si pour moi elles sont d'un domaine autre (je crois en des choses non "étatiquement" reconnues...)...
RépondreSupprimerLe problème de la religion pour moi, outre les injustices exposées par Natacha, c'est aussi que la religion n'existe pas sans pouvoir, et c'est tellement antagoniste tout ça...
Vastes questions que celles de la foi et de la prière... de la révélation et de ce que les hommes en ont fait, avec leurs limites, leurs envies de pouvoir, leurs imperfections.
RépondreSupprimerQuoi qu'il en soit, quand je suis face à l'immense beauté de la nature, il m'arrive souvent de louer le Créateur. C'est ma façon de prier...
A ce propos, je cite souvent Saint-Exupéry : ..."Ce qu'il y a de grand dans la prière, c'est qu'il n'y est point répondu ".
RépondreSupprimerJe n'ajouterai rien à mon billet... vous laissant l'espace des commentaires pour vous exprimer
RépondreSupprimerSi vous le souhaitez
Juste une chose, si vous permettez...
Je ne parle pas ici de religion...
C'est autre chose pour moi!
@Walrus... (on s'est croisés)
RépondreSupprimerj'ai juste envie de te dire que certains disent que la prière les a aidés à passer des moments difficiles...pour eux, Dieu leur a répondu...
mais encore une fois: quel Dieu? Un Dieu réel? Un Dieu fantasmé?
L'idée même de la prière me met particulièrement mal à l'aise. Parce que j'ai l'impression qu'elle est "adressée"... or je me demande bien à qui/quoi (?) elle peut l'être !
RépondreSupprimerSi elle n'a rien à voir avec la religion, il me semble qu'elle à cependant a voir avec "Dieu" ou quoi que ce soit qui ressemble à cette idée. Et ça me dérange parce cela fait intervenir une instance supra naturelle qui aurait quelque conscience, quelque dessein, quelque pouvoir sur nos vies...
Et comme tu dis, la prière quémande souvent. Pour moi elle tend à déresponsabiliser l'humain.
Certes elle peut aider ceux lui accordent un pouvoir, et alors tant mieux ! Mais gare aux désillusions quand les prières se révèlent être (et pour cause...) impuissantes à exaucer leurs voeux !
« Rendre grâce », par contre, est d'une autre nature à mes yeux : c'est prendre conscience d'une chance, c'est la reconnaître. C'est me réjouir d'être vivant, par exemple.
je suis dans un cheminement similaire ... Après 12 ans de méditation bouddhique, j'ai tout lâché, je n'y mettais plus de sens, ni de présence. J'ose aujourd'hui me recueillir sans moyen, sans prière déjà faite, surtout sans groupe religieux ... J'essaie de cueillir la force d' l'instant, de trouver la présence, la vraie, pour soi et pour les autres. Cela demande plus de force, mais cela me plait d'être en chemin ... la religion amène trop de certitudes, trop de réponses toutes faites, même si elle s'en défend. le seul principe auquel je crois c'est l'idée d'une grandeur qui me dépasse, m'entoure et à laquelle je peux me relier. Il me semble que la vie est plus ouverte sans dogmes (et même lorsqu'elle prône la liberté, la religion ne peut se passer de dogmes), elle ouvre ainsi sur le créatif, l'incertain, l'improbable. Du coup, la vie devient plus créative ...
RépondreSupprimerJe me garderais bien de tout débat sur cette question, pour rester dans l'expérientiel que tu évoques.
RépondreSupprimerCe qui me frappe ce sont tes propos : « je ne me comprends pas moi-même ». Cela semble à la fois comme une dynamique et un frein.
Si je comprends bien, tu passes de « parler à quelqu'un » à « t'adresser au souffle qui est en toi. »
Où est pour toi la différence ?
Mon expérience est similaire aussi.
RépondreSupprimerAutrefois, je priais beaucoup pour remercier.
un jour, je me suis dit "plutôt que remercier un Dieu devenu de plus en plus hypothétique en moi, je préfère remercier les gens".
oui, je sais que l'un n'empêche pas l'autre, Mais bon, comme je le disais, ma foi (en Dieu) était de plus en plus inexistante (j'ai une idée, moi, du pourquoi, mais ce serait un peu long !)
Du coup, prier pour demander me semble hypocrite. Sauf prier pour les autres, mais cela devenait plus de l'ordre du souhait que de la prière.
Mais j'ai la sensation d'avoir "perdu" quelque chose.
Même si j'en ai gagné d'autres !
Je ne prie pas, je médite. Juste la conscience de ce qui se déroule dans l'instant.S'accompagner du souffle.
RépondreSupprimerLe souffle: esprit et respir ont les mêmes racines.
J'aime beaucoup ce que dit Zenondelle, ça me ressemble.
RépondreSupprimerA ceci près que je n'ai pas fait de méditation bouddhique : les "chemins" religieux m'inquiètent, car je crains trop d'y perdre l'indépendance de ma pensée. Même si quelque part, ma spiritualité s'inspire d'un "fond de culture" (fort mince, il est vrai) oriental.
J'aime beaucoup ce que dit Yog.
A ceci près qu'il faudra bien un jour que je me mette quelques coups de pied au cul pour m'imposer la ré-gu-la-ri-té dans la méditation...
:o$
Tiens ?! Ca marche !
RépondreSupprimerLà, ch'uis complètement hors sujet, mais je suis très étonné : depuis le début du mois, plsieurs de mes commentaires se sont perdus dans les méandres de... de quoi, d'ailleurs ?
De mon poste pro, qui ne fait peut-être pas toujours ce qu'il veut ? De blogspot, qui ne voulait peut-être pas de moi ? La frontière ? La barrière de la langue ? Va savoir...
Je profite de l'aubaine pour vous présenter des voeux qui ne vous étaient pas parvenus jusqu'à présent : bonne et heureuse année à la maîtresse des lieux ainsi qu'à tous mes p'tits camarades de comm' !
Candide, réjoui
PS: pourvu que ça dure !
Et si, tout simplement, nous ne pouvions pas faire autrement, fondamentalement, que de nous adresser à autrui pour communiquer notre peur du vide? Qu'on l'appelle le souffle (très belle image Coum!) Dieu, Vichnou, l'Univers, ou Jupiter, qu'on le voie dans chaque pétale de fleur ou au fronton des églises, que l'on se parle à soi-même ou que l'on parle à son chat ou son poisson rouge, aux lignes d'un cahier secret ou aux milliers d'anonymes virtuels d'un blog, nous maintenons tous ce fil que tu penses avoir perdu. Les cris dans le désert d'un aviateur s'inventant une rencontre avec un petit Prince tombé du ciel en sont un exemple de plus. Nous hurlons, nous chantons, ou nous murmurons notre condition absurde à qui veut l'entendre.
RépondreSupprimerLe souffle , le non palpable , ni représentation ,pas d'image
RépondreSupprimerJe pense comprendre le sens de ton billet
ce qui me semble bon à prendre dans cette expérience là , c'est cette idée que tu ne ressens pas de vide
sujet difficile à commenter ...
Inévitablement , ça nous renvoie à nos expériences personnelles
Mes prières sont mes songes. Ou mes pleurs, parfois. Souvent mes sourires. Ou ma peur de voir des sanglots dans des yeux clairs. Mes lentes nuits hors des fantômes…
RépondreSupprimerEn mon âme et inconscient, il y a quelque chose ou quelqu'un qui m'échappe et avec qui pourtant j'aimerais être en communion.
RépondreSupprimerLa prière serait une communion (comme une union) avec cette partie spirituelle ( divine?) de soi.
ben moi j'aime bien prier. Ça me fait du bien et ça ne fait de mal à personne. :)
RépondreSupprimerEt si cette prière, ce souffle, avait justement toujours été, en son essence même, cette écoute profonde de l'autre, cette empathie qui ouvre ton esprit aux joies et aux peines d'autrui ? Par conséquent tu ne l'as jamais perdu, chère Coumarine. Le souffle est toujours en toi, chacun ici peut l'appréhender. Et l'admirer...
RépondreSupprimerBien amicalement
Parfois je suis trop loin pour prier, trop loin dans la souffrance. Je sais que l'Esprit est là mais je ne trouve pas les mots pour Le toucher, ni la force pour y croire. Il faut parfois aller jusqu'au fond de la douleur, et de la douleur s'élève à nouveau la confiance. On peut Lui parler. On renaît...
RépondreSupprimerMerci à chacun et à chacune pour vos commentaires, de dire quelques mots de ce sujet qui semble si tabou...prier c'est jugé comme nunuche
RépondreSupprimerJe me suis sentie comprise très fort par certains d'entre vous, qui je pense vivent des expériences similaires...! (je ne citerai personne ;-))
@Vertumne, je suis chaque fois contente de te voir, c'est bon que tu ne m'oublies pas
@Candide... ton commentaire m'inquiète un peu, de plus en plus de gens m'écrivent pour me dire les ratés dans les commentaires;-((
@Sophie... tes paroles d'amitié me font un bien fou,particulièrement ce matin. MERCI
Chere coumarine
RépondreSupprimerLa question de Dieu semble te rejoindre réguliérement en ce moment.
Je rejoins ta citation inversée "c'est dans le bonheur qu'on apprend à prier".Cette citation n'existe pas et pourtant c'est dans le bonheur que j'ai appris à prier. De tous petits bonheurs au début, un sourire, un beau ciel, un chat ronronnant croisé sur un fenetre, une odeur de jasmin, le calme d'un thé. Un petit "merci" jaillissait de mon coeur comme une bulle de savon, irisée, captivante, fragile.
Et puis mon merci s'est amplifié au fil des ans, j'ai vu de plus en plus de belles choses comme si mon coeur et mon regard se dilataient des mercis murmurés. Même les malheurs de ma vie finissaient par me faire dire merci construisant en moi peu à peu une confiance que dans tout drame Dieu me montrera le sens, le chemin, le merci.
Face aux drames je suis un tel fétu de paille et pourtant même au coeur du noir je sais que la joie reviendra car je l'aime ce Dieu et il m'aime, cette certitude je pense que plus rien ne me la ravira jamais. Il est ma grande richesse.
Au fil des ans je suis entrée dans des mercis de plus en plus grands qui depassent de loin ma propre vie, des mercis humbles, frémissants, émerveillés et discrets que tu es la seule à connaitre désormais (avec les lecteurs de commentaires).
Merci pour toi.
L'absence et la présence , ce sont les deux côtés d'une même médaille, d'une même réalité, l'une ne peut aller sans l'autre..alors sachons tourner la médaille tantôt d'un côté , tantôt de l'autre pour en voir les deux aspects..quant à prier, il me semble en effet que c'est se relier à la partie divine qui est en soi et ce n'est pas nombriliste car si l'on est profondément relié à soi-même, on est aussitôt relié à tousz les autres humains
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