jeudi 7 mars 2013

La chute

Ce matin, ont lieu les obsèques d'une dame que je connais sans la connaître
Je pense à elle, je pense surtout à la cause de sa mort: une "bête" chute


J'ai repensé à un épisode de la vie de ma grand-mère maternelle que je n'ai jamais connue, elle est morte à 42 ans

Je vous en donne ici la lecture: c'est un extrait de mon livre L'enfant à l'endroit, l'enfant à l'envers (éd. Traces de vie, 2008) (toujours disponible, si vous le désirez...)



T’en souviens-tu ? Dis, t’en souviens-tu ?

La guerre est finie. Tes enfants sont revenus. La ville se reconstruit lentement. La vie a continué dans cette simple famille ordinaire : le père, la mère, le fils et la fille.

C'est un dimanche à la campagne. Il y a là, encore immobile sur la route, une carriole tirée par deux chevaux. Le père piaffe d’impatience, ou alors ce sont les chevaux, on ne sait pas trop. L’air est électrique. Les chevaux sont nerveux. Ou alors c’est le père, on ne sait pas trop. Le père brandit déjà le fouet. Le fait claquer dans l’air. Mais l’air est à l’orage. Lourd, inquiet, nerveux. Les deux enfants sont montés dans la carriole. Ils sont excités, ils rient, se taquinent, s’asticotent... Les chevaux piétinent, impatients. Les sabots cognent sur la terre desséchée. Le fouet virevolte, frappe l’air qu’il déchire… L’homme est énervé, il attend sa femme qui comme toujours est en retard.

La voilà enfin ! Elle court, elle vole, elle s’envole, la robe légère soulevée par le vent. Le vent qui s’est fait violent. La mère s'apprête à monter à son tour pour rejoindre ses enfants sur la plage arrière de la carriole, quand soudain les chevaux s'ébranlent, frappés sèchement par le fouet du père...la mère tente de s’arrimer, mais elle trébuche. Brutalement. Choc du corps qui tombe mais reste accroché à l’arrière de la carriole qui continue impitoyablement d’avancer.
Les enfants voient leur mère traînée par terre. Le temps s’écoule au ralenti. La carriole  continue d’avancer comme si de rien n’était. Rires suspendus. Terrifiés, glacés par la peur, le garçon et la fille entendent leur mère crier de douleur et supplier le père d'arrêter cette  carriole. Ils crient aussi. ARRETE PAPA... Hurlements. Le cœur qui bat la chamade. Douleur. Les chevaux s’immobilisent enfin. Le père, la mère, le fils et la fille sont figés dans cet étrange silence qui suit toujours le tohu-bohu des catastrophes.

C'est alors que la fillette entend les paroles que sa mère prononce comme dans un souffle: "cette chute causera ma mort". L'enfant a douze ans. Deux ans plus tard, alors qu’elle semblait depuis longtemps remise de cet accident, la mère "tombe" malade, sombre dans la dépression, commence à perdre l'usage de ses jambes, doit s'aliter de plus en plus souvent, laissant sa fille prendre en charge le ménage et les soins à la malade. L'enfant n'a que quatorze ans...

Cette femme qui a chuté si lourdement, c'est toi Eugénie, t’en souviens-tu ? C’est toi qui as fait cette prophétie de malheur. C’est toi qui, au moment de cette chute, n’avais plus que quelques années à vivre. Pressentais-tu déjà que tes jambes te fausseraient compagnie, qu’elles capituleraient devant le mal qui te rongerait et provoquerait ta mort ?
Ma mère m'a raconté cet épisode qui l’a sûrement marquée d’une   empreinte indélébile, peu de temps avant sa mort, alors qu’elle-même était âgée et malade et que je tentais de lui poser les ultimes questions pour  mieux comprendre son histoire, mon histoire. Je ne sais pas si elle a jamais raconté ce souvenir à d'autres que moi. Mes frères par exemple. La pudeur empêche parfois de poser les questions essentielles et d’en donner les réponses. La pudeur au sein d’une  famille ordonne bien souvent le silence.
Mais ce que je sais, c'est qu'elle m'a raconté cet épisode de son enfance avec des larmes dans sa voix de personne âgée...Oui, j’en suis sûre, elle a dû être très frappée par ce qui s'est passé là, en ce jour lointain de son enfance. Et  les paroles de sa mère  ont dû résonner  en elle comme une prédiction maudite.[...]

Le jour de cette confidence à laquelle je ne m’attendais pas, je l’ai vue émue, les larmes au bord du cœur. Elle s’est retenue en balayant rapidement ce souvenir d’un mot fatigué : « tout cela est vieux, tout cela est du passé ». Et bien sûr, ce qui est passé, on n’en parle plus. A quoi cela sert-il de remuer de vieilles histoires ? Pourtant  cet épisode a conditionné tellement de choses dans la génération des femmes que nous formons : Eugénie, ma mère et puis moi, leur petite-fille et fille…

Ai-je assez parlé à mes enfants et particulièrement à mes filles, de ce qui constitue la trame de leur Vie ?

38 commentaires:

  1. Je me souviens parfaitement de ce passage de ton livre , cet accident , ce drame , 42 ans ...et la vie en suspens ..
    C'est étrange , on a souvent peur de la maladie , heureusement , on se croit épargnés par les tragédies , les mauvaises chutes , les trucs bêtes comme on dit
    Quand même , la médecine a tellement progressé , de nos jours , ta grand mère aurait été soignée , elle aurait subi des examens approfondis , elle aurait certainement vécu pleinement
    Je comprends combien le décès de cette femme te touche Coumarine ..

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    1. Non cette dame je ne l'ai jamais rencontrée.
      Mais la raison de sa mort m'a touchée, fort
      Parce que moi aussi trop souvent,je trébuche et perds l'équilibre. Mais je me relève sans autre problème qu'un simple hématome...
      A quoi tient la vie...?
      La médecine traite mieux, guérit parfois... mais ne contrôle pas tout!
      Ma grand-mère souffrait (peut-être... je ne le sais pas avec certitude) d'un cancer des os.
      Mais dans sa tête, il a été provoqué par cette chute... la prophétie qu'elle a faite sur elle, s'est réalisée

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  2. Je me souviens avoir pleuré beaucoup en lisant ton livre, et notamment cet épisode.Oh les yeux effrayés des enfants voyant leur mère... La mort est toujours bête, mais des fois, elle s'applique particulièrement.
    Je te tiens la main.
    Et je t'embrasse fort.

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    1. oui mais toi Célestine tu es une femme très sensible..
      ;-))
      Je reconnais que mon livre est une boule de sensibilité, même si le plus souvent j'écris en introduisant de la distance
      Mais je n'ai pas beaucoup(pas assez je crois) parlé de ce roman autobiographique.. il mérite d'être lu ;-))

      J'y pensais alors qu'un ce moment s'est ouvert la Foire du livre à Bruxelles ;-))

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  3. J'avais trois ou quatre ans quand on apprit qu'un voisin d'une trentaine d'année était mort d'être tombé sur le trottoir, sa tête ayant mal porté. Bien que très floue, la notion de mort m'était déjà connue. Mais imaginez le boulot dans la tête d'un enfant dont les explorations se soldaient parfois par une chute et qu'on s'évertuait à convaincre que les trottoirs de Ménilmontant étaient des lieux de sécurité !
    Ca m'avait sidéré.
    J'en suis revenu, et j'ai pris quelques bonnes pelles depuis, moto, VTT...

    Ce billet amène à se poser la question de la pérennité de la vie.
    En ce XXIème siècle, on se plait à penser qu'on a tous droit à l'espérance de vie moyenne de la population à laquelle on appartient.
    Il s'agit pourtant d'une incroyable château de cartes, branlant comme pas deux, somme improbable de milliers d'équilibres électrochimiques totalement interdépendants...
    A ce propos, un bouquin passionnant : "Mon corps, la première merveille du monde" d'André Giordan, chez Lattès
    On en vient à se demander comment on fait pour parvenir à vivre, et surtout, aussi longtemps !
    Injuste loterie ?

    PS: dans l'Yonne, crocus et jonquilles commencent à montrer le bout de leur nez...

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    1. Candide, je vais juste réagir sur la dernière phrase de ton commentaire
      Crocus et jonquilles dis tu? YESSSS ici aussi, les crocus s'en donnent à coeur joie
      Tiens je me demande, pourquoi sommes-nous tous si attentifs et si heureux à guetter les premiers signes du printemps?
      pour ce qui précède, oui, la vie ne tient qu'à un fil, comme dit la sagesse populaire... alors les crocus et les jonquilles qui pointent le bout de leur nez, c'est very very important!!!!

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  4. mon père était pareil, les drames qui ont marqué son enfance, (la mort de sa maman, surtout) il n'en a parlé qu'une seule fois, pour terminer lui aussi par un "c'est loin tout ça, c'est du passé"
    il refusait de se laisser attendrir

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    1. nos parents ne parlaient pas de leurs sentiments...
      Il n'y a pas si longtemps qu'on encourage les enfants (et les adultes) à parler de ce qu'ils vivent...

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  5. Ton livre, au Québec, on se le procure de quelle façon?
    Il mérite d'être lu dis-tu je n'en doute pas un instant.

    Et comme c'est vrai, le passé a conditionné beaucoup de choses dans nos vies...
    Un événement comme tu racontes laisse ses marques en nous et conditionnera jusqu'à un certain point notre façon de voir, de réagir dans le futur.
    Ce qui m'étonne c'est de voir cette vulnérabilité que l'on a et à la fois une si grande force. La force de se relever toujours, la force d'accepter, la force de continuer à vouloir aller de plus en plus loin, de plus en plus profondément en soi.
    Notre vulnérabilité nous pousse, je crois, à aller vers de plus en plus de conscience... Maty

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    1. Te procurer mon livre? c'est simple, tu me le demandes, je te l'enverrai...
      Je t'écris demain un mail à ce sujet...

      j'aime bcp ta phrase:Notre vulnérabilité nous pousse, je crois, à aller vers de plus en plus de conscience..
      C'est ce qu'il s'est passé pour moi, c'est évident

      Vulnérabilité et en même temps grande force... vrai aussi pour moi, si j'en crois ce qu'on me dit ;-))))

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  6. Mince ! Déjà 5 ans que tu as écrit ce livre ?!
    Je l'ai encore en mémoire comme si je l'avais lu hier.
    Un livre beau, puissant, intense, et qui ne peut que nous rejoindre intiment tant il aborde des thèmes essentiels.

    A quand le suivant ?

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    1. "Un livre beau, puissant, intense"
      Merci Alain... tes mots me font du bien
      Le suivant, j'y travaille: ce sera un témoignage sur la maladie

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  7. Bonsoir Coumarine

    Autant je me souvenais parfaitement de la scène visuelle, autant les sons ne m'étaient pas restés en mémoire Et puis en te lisant ce soir me frappe (au sens propre) :combien d'enfants ont dit : ARRETE PAPA. ?
    Cette phrase me glace bien au delà du drame que tu racontes. Certes ils sont en majuscule, mais je ne vois qu'eux. Pourquoi ? je n'ai pas la réponse.
    Chacun d'entre nous réagit pour des raisons de proximité parfois inexpliquées à un drame plus tôt qu' à un autre.
    Etrange, la radio que j'écoute me dit "lève toi et marche" . Raccourci saisissant.
    Je t'embrasse parce que je ne sais rien faire d'autre.

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    1. Oui Nicole le raccourci est saisissant: tant de fois nous sommes couchés dans notre mal-être, incapables d'avancer...

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  8. Chaque fois que tu évoques ta grand-mère, je me souviens de nos premiers échanges à propos de sa photo et à l'intérêt que j'avais pris à parcourir tout ton blog de l'époque.
    Je t'embrasse.

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    1. Ah oui, Walrus! Je me souviens de ces échanges à propos de cette photo
      Merci d'être toujours là...

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  9. La chute c'est camusien en diable !
    ici nous avons le capitole, pourtant la roche tarpéienne n'est pas bine loin
    la chute c'est bien ce que j'ai vécu une nuit de décembre 2011 , avec l'impossibilité de se relever et depuis le sol, le monde avait une autre allure, je l'ai considéré différemment, j'ai changé de point de vue, il n'y avait pas d'autre possibilité et la position m'en était imposée par les circonstances.
    Du moins avais je l'espoir de m'en relever plus tard et de retrouver un monde plus vertical où m'appuyer pour avancer, alors que je ressemblait à un crapaud ou une sauterelle au sol . pas littéralement atterré mais confondu par les circonstances et aussi la notion d'effondrement , de certitudes mais aussi d'espoirs, je pouvais amorcer<avec cette descente brutale une métamorphose par la patience, l'introspection et le média de la feuille rapidement noircie de diverses considérations.
    Je retrouvai le sens du temps long Braudélien, je devenais observateur et dévêtu de mon rôle d'acteur, avec mon seul pagne d'exigence de ne pas perdre toute intégrité ni dignité j'entamai le chemin long, douloureux de la réhabilitation mais aussi de la ré habitation de ce corps qui m'avait trahi et que j'avais fuit.

    Coumarine j'évite les jeux de mots laids mais je suis bien content de me dire que tout cela est derrière car jamais il ne me fut donné de vire une telle épreuve confronté à moi même.

    je t'embrasse et te remercie pour ton texte sensible.

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    1. Je me souviens Thierry de cette époque douloureuse où tu étais cloué sur un lit d'hôpital
      Je ne souviens de ta façon à toi de lutter, d'aller de l'avant...
      En quelque sorte nous avons lutté ensemble...

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    2. oui mais ce n'était qu'une affaire de patience , j'ai bien sur trouvé le temps long, 4 mois et demi ce n'est certes pas rien mais en fait ça m'a appris à vivre...différemment, et recentrer des questions et des sujets de préoccupation. Certes il y a quelques séquelles définitives mais comme j'avais peu de stigmates jusque là et puis je n'ai pas été crucifié !
      bonne journée Coum

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    3. je pense qu'on apprends BCP quand on doit affronter une maladie... BCP...

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  10. Comme j'ai lu ton livre, je me souviens parfaitement de cet épisode et de ses conséquences.

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  11. oui, parlons-nous assez avec nos enfants de ce qui a marqué notre vie?
    La pudeur parfois nous tient coi...la peur de ne pas savoir raconter avec assez de justesse
    et comme c'est dommage de continuer à se taire

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    1. oui, c'est dommage... apprendre à "dire", c'est capital!

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  12. Quel dommage cette pudeur des mots ! C'est ainsi qu'à moins de trente ans, je ne connais pratiquement rien de mon passé, de mes ancêtres qui ont déjà changé de monde...
    Tant de questions qui se bousculent et dont je ne sais que faire car je n'aurai jamais les réponses !
    Et avec ceux qui sont encore là, impossible de nouer contact, dès qu'on parle des défunts, du passé, les mots ne sortent plus.
    Et pourtant, savoir et partager, c'est tisser un lien avec l'autre, non ?

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    1. trouver les mots, Mnêmosunê... et parler
      Après quand c'est trop tard, on regrette tellement...

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  13. D'abord, bonne fête en cette Journée Internationale de la Femme! Cela me rappelle ma lecture de ton livre. Une petite surprise t'attend aujourd'hui sur mon blog... Bon week-end.

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  14. C'est un texte très émouvant qui me fait penser au livre d'Anne Ancelin, Aïe mes aieux !
    Bon week end.

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    1. ah! Anne Ancelin...
      livre important en effet!
      merci Bonheur du Jour!

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  15. Une histoire terrible, racontée avec sobriété, très émouvante, où passe le désespoir et la violence de tant de vies meurtries.

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  16. Je me souviens bien de cette histoire racontée dans ton livre et pour répondre à ta question, non je pense que l'on ne parle pas assez.

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    1. Parler quand il en est encore temps... c'est important
      Nous les grands mères "modernes", on a bien saisi l'enjeu et on parle davantage, non?

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  17. j'avais beaucoup aimé ton livre et je relis avec la même émotion ce souvenir de l'histoire de ta grand-mère et de ta maman.

    tu poses la question de savoir si nous transmettons suffisamment à nos enfants, sans doute pas assez mais c'est curieux car, en ce qui me concerne, c'est plus ma petite-fille que mes enfants, qui me pose des questions (elle aime beaucoup).

    Je me dis aussi que j'ai bien fait de constituer un album à ma mère il y a 15 ans avec des détails que la pauvre, à présent a bien perdus ! les autres souvenirs me sont donnés par mes frères et soeurs ; c'est important de connaitre la vie de nos parents et grands-parents ; j'aurais aimé en savoir encore plus.

    bonne soirée. je t'embrasse

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    1. j'avais moi aussi fait un album récapitulatif pour mes parents quand ils vivaient encore
      Je l'ai repris ce soir... c'est un trésor de mémoire!!

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  18. J'ai été plus que touchée par ton récit, Coumarine. J'avais l'impression d'assister impuissante à la scène et de crier avec les enfants...

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  19. Ce matin, je me fiche bien de la neige qui ampute notre région. Et le froid de mes mains n'est pas du à quelques flocons qui seront bien vite oubliés.
    Je viens de lire ton récit et j'en reste toute chose.

    bien sûre j'arrive tellement tard, qu'il me sera sans doute difficile de lire ton livre ...t'en reste t il un ?

    ***

    J'ai lu aussi les commentaires et tout ce que tu exprimes des gens après leur avoir offert ce qui te tient à coeur.
    La grande sensibilité dont tu fait montre dans tes écrits a toujours une répercution sur nous et je pense que c'est une bonne chose.

    Tomber. Tomber, voilà une chose qui avec le temps nous effraie à juste raison. Enfant, on ne pense pas à tout cela, on tombe , on pleure , on se relève on est dans l'instantanéité, on oublie.
    Mais adulte, les chutes sont plus spectaculaires, plus douloureuses, plus questionnantes.


    Il y a quelques mois je me hâtais pour aller soigner un patient.
    Les mains chargées, mon pied n'a pas vu cette butée métallique habillement peinte.
    Je voulais passer avant que le portail métallique ne se referme sur moi.j'ai couru, mon corps n'en a plus l'habitude.Et là : la perte d'équilibre, le béton qui arrive à pleine vitesse vers moi et pourtant si lentement, me laissant le temps de penser que je vais me tuer, A 42 ans (coincidence qui me fait te raconter ?).
    Un "beau" vol plané -Amusant de constater les qualificatifs lorsque l'on raconte à distance de l'événement- une figure tuméfiée, une main en sang, un jean's crapeauteux .

    Je suis restée au sol un moment, sonnée. Le conducteur qui attendait à quelques centimètres derrière moi, impatient, au bout de quelques minutes a daigné baisser son carreau malgré la pluie, pour me demander de bouger, il n'avait pas que ça à faire.
    je me suis relevée douloureusement en me maudissant de l'effet que mon jean's sale allait produire sur mes patients suivants. je suis arrivée. la famille du patient a fait une blague ou deux puis m'a permis à ma demande de me laver les mains. j'ai enfilé ma paire de gant et je lui ai fait sa prise de sang avec des doigts en feu. boulot oblige.

    ***

    En vous lisant tous, je me suis fait aussi la réflexion que tout comme les chutes, le travail sur soi est lié à l'âge.
    En vieillissant, on pense plus. On cherche les réponses aux questions qu'on a pas eu le temps de se poser lorsque l'on était dans le tourbillon de vie de l'enfance et du début de l'âge adulte.

    Puis vient cette quarantaine. Et c'est au fur et à mesure que l'on obtient nos réponses, que l'on apprend à se connaitre, que l'on gagne en sérénitude, que notre corps qui nous trahit. Les douleurs gagnent, toutes les douleurs.

    Parfois je me surprends à me dire qu'au bon génie de la lampe je demanderais bien ma conscience de maintenant dans mon corps de 20 ans. Mais je sais que ce ne serait pas la même chose. Au final, j'ai vaincu de nombreux obstacles , passé tant de tortueux chemins pour trouver le mien, que je ne regrette rien

    merci Eugénie, merci Coum pour ce voyage en voiture à cheval et celui dans ma conscience. Les voyages ne sont pas toujours de tout repos mais ils nous façonnent . merci , bonne journée à toi

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