mardi 13 juillet 2010

Trop beau pour durer, n'est-ce pas?

C'était au temps où je faisais des prophéties sur un futur aléatoire.
Au temps où je redoutais le lendemain d'un jour heureux, ou ensoleillé, ou amoureux, ou amical.
Demain, ah la peur de demain venait souvent se mettre en travers de mon bonheur d'aujourd'hui.
Par exemple, aujourd'hui s'il faisait beau et chaud, je me disais qu'on allait le payer demain, c'était sûr...un orage terrible, des inondations...je le sentais venir!
ou alors: ça n'allait pas durer, ça finirait un jour (cette amitié par exemple... ou cette relation amoureuse, ou cette belle entente, ou continuer sur une bonne lancée ou... n'importe quoi de positif )

C'était au temps où j'étais pas capable de vivre simplement le bonheur de l'instant présent, redoutant la tuile qui n'allait pas manquer de me dégringoler dessus, la fausse note qui signerait la fin du concert si harmonieux de l'instant présent
Tout ça était chaque fois trop beau pour durer, n'est-ce pas?
C'était comme si je ne me jugeais pas digne de vivre du bon. Comme si je devais expier je ne sais quelle faute secrète. Comme si les bonnes choses à vivre au présent étaient suspectes et supposaient que demain cela ne pouvait que se terminer. D'ailleurs c'était simple, on ne pouvait se permettre d'être heureux dans ce monde si souffrant. Rire, être en joie, était une injure pour tous ceux qui souffraient.
Il y avait toujours un coin d'ombre ou d'inquiétude, venant tempérer mon petit bonheur du jour. 

C'était au temps où il m'était difficile d'être simplement heureuse, sans arrière pensée, et d'en profiter en toute sérénité, sans culpabilité, sans peur du lendemain qui venait systématiquement obscurcir ma joie

Et le pire, c'est que à force de redouter que demain ne vienne abîmer aujourd'hui, cela s'est passé effectivement comme cela, bien des fois. Les bonnes choses s'y connaissaient pour se mettre à fondre! A s'évanouir à l'horizon! Et donc je me donnais raison! N'est-ce pas que j'avais raison? J'avais bien deviné que cela finirait par tourner mal! Que cela ne durerait pas...

C'était au temps où j'étais douée en prophéties peureuses, frileuses et négatives

Puis est arrivé un autre temps. Le temps où j'ai réalisé que je pouvais faire d'autres prophéties, des prophéties de bonheur, et qu'elles dépendaient en grande partie de moi. 
Pas complètement, évidement, mais beaucoup plus que je ne le croyais...
Comment j'y suis arrivée? (pas toujours hélas, mais le plus souvent désormais)
Ça, c'est une autre histoire...


peinture Léon Spilliaert



21 commentaires:

  1. "C'était au temps où j'étais douée en prophéties peureuses, frileuses et négatives". Je connais bien, moi aussi, ces prophéties, mais contrairement à toi, elles sont encore bien présentes en moi... elles s'accrochent... :-(
    Et comme tu le dis, ces prophéties peuvent prendre un autre visage, et c'est nous aussi, oui, qui pouvons leur donner cet autre visage. Il faut s'en persuader, et tout ira mieux :-)
    Bonne soirée à toi, Coumarine, et douce nuit.

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  2. La suite est une autre histoire ... j'aimerais bien l'entendre.

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  3. J'ai toujours été un peu allergique à ces prophéties frileuses. Je dois probablement cela à mon père qui avait une confiance dans la vie... presque jusqu'à son dernier souffle ! (Merci Papa de m'avoir transmis cela !).
    Belle journée, Coumarine !

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  4. Merci Coumarine pour ce billet que je lis quelques heures avant de partir me ressourcer auprès de celles qui savent si bien chanter.
    Moi aussi j'aimerais bien lire la suite, même si je ne prends pas le temps de te laisser un vrai commentaire.

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  5. Je vais m'y essayer, sait-on jamais!!!

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  6. Bjr Coumarine, l'autre histoire est sûrement une grande remise en question, une intériorisation qui demande beaucoup de temps, de patience, de persévérance pour arriver à vivre vraiment le moment présent parce que finalement ii n'y a que celui là qui est vraiment vrai...mais ça nous le savons bien est "un travail" de tous les instants et chacun son chemin pour y arriver...mais ce n'est pas pour cela que je viens faire un commentaire...mais tout simplement parce qu'en te lisant, je réalise qu'en n'ayant pas du tout eu la même histoire que toi, n'ayant pas eu les mêmes ressentis, j'ai quand même moi aussi souffert...et pourtant j'étais du genre :"ça ira mieux demain! dans la vie faut pas s'en faire tout ça s'arrangera..."...mais c'était en moi qu'il fallait que ça s'arrange...et ça je l'ai compris petit à petit, au fur et à mesure que je sentais que malgré mon optimisme, tout commençait à aller de travers...c'est donc en te lisant que je me rends compte encore mieux que ce n'est pas en imaginant le pire ou le meilleur que l'on arrive à s'en sortir mais vraiment en vivant le moment présent...je me répète...c'est vrai...mais selon moi il n'y a vraiment que ce moment là qui a été et qui est libérateur de mes souffrances...mais ce n'est pas quelque chose que l'on trouve facilement, ce n'est pas les mots (qui cependant nous aident) et puis notre regard a besoin de changer et rechanger encore pour enfin trouver un certain équilibre qui nous permet de ne pas pencher trop d'un côté ou de l'autre, qui nous permet de rester là où on est et de s'y sentir bien, de ne pas vouloir que les choses soient différentes tout en ayant au fond de nous le désir qu'il y ait un profond changement dans le comportement humain pour que les gens qui souffrent, qui sont laissés de côté retrouvent eux aussi la joie de vivre et qu'on ait pas l'impression que ce ne sont que des mots...je suis désolée Coumarine mais je ne sais pas bien exprimer ce que je veux dire...alors je te souhaite simplement, ainsi qu'à tes lecteurs et lectrices un bon dimanche!

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  7. J'y suis arrivée depuis peu, mais oui, je peux dire que je vis ici et maintenant. Je croque l'instant présent et demain, il viendra dans une poignée d'heures assez rapidement et il deviendra aujourd'hui...J'ai des projets, des objectifs mais à courts termes, j'ai de plus en plus de mal à me projeter dans l'avenir non pas que j'en ai peur mais parceque cela me semble si lointain. Je vis au rythme des saisons et je me fais à cette raison que j'ai le droit à ma part de bonheur, de ces petites choses qui ravissent le coeur et que je n'ai pas "à les payer " en retour par un malheur qui viendra ou ne viendra pas. Notre chemin n'est pas une route linéaire, on peut contourner l'obstacle, ou bien trouver la solution pour ne pas trop souffrir des creux et bosses ou bien faire demi-tour...Par ailleurs, pour clore ce long bavardage, je ne peux m'empêcher de partager en faisant des petits gestes vers l'Autre dans mon quotidien...

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  8. Ah, le délicat équilibre entre le douloureux regard sur un monde en déclin et l'insouciante bigoterie du bonheur…

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  9. Ton texte rejoint celui que j'écrivais hier...Bon ou mauvais, puisque nous n'y pouvons rien changer, prenons ce qui vient et vivovns le pleinement et nous verrons que même dans les moments difficiles, il y a de la joie à savourer...Je le sais puisque je l'ai expérimenté même si je n'arrive malheureusemnt pas à le vivre ainsi constamment..bonne journée Coumarine!

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  10. C'est qu'en prenant de l'âge, on ne court plus autant, ni après les tuiles ni après des merveilles qui vont peut être arriver si et quand...

    Le présent a une réalité presque physique. On s'y vautre et on s'y love.

    Et puis, l'âge a aussi apporté ceci: on sait que si une onde négative s'abat sur nous, on s'en sortira comme des précédentes. On les craint moins, on sait qu'elles auront affaire à nous!

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  11. Après 15 jours de vacances je viens te relire avec plaisir Coumarine.

    Me voilà projetée dans mon enfance : «… on ne pouvait se permettre d'être heureux dans ce monde si souffrant. Rire, être en joie, était une injure pour tous ceux qui souffraient. »
    Ce souvenir de ma petite enfance me saute à l’esprit. Après avoir porté pendant de nombreuses années des gilets tricotés-mains, j’ai enfin reçu un « vrai » gilet acheté en magasin. En me l’offrant maman m’a recommandé : « Ne va pas te vanter de ce cadeau ! Pense à tous ceux qui… ». J’osais à peine m’en réjouir !

    Et encore ceci : «… il m'était difficile d'être simplement heureuse, sans arrière pensée, et d'en profiter en toute sérénité, sans culpabilité ». Après plus de 50 ans, il m’arrive encore d’avoir difficile à m’offrir du bon temps tant que la vaisselle et les lits ne sont pas faits !

    Ah si je pouvais d’un coup de baguette magique envoyer promener ces injonctions de mon enfance, je culpabiliserais moins souvent !

    Merci Coumarine pour ces petites touches et remises en questions !
    Le Creuset

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  12. Non, il n'est pas nécessaire de souffrir maintenant pour espérer un avenir meilleur. Je profite de l'instant sans vouloir que demain arrive trop vite. Si demain m'apporte de la joie, je serai heureuse d'en jouir, si c'est de la peine, je suis forte et saurai la dépasser.
    Carpe diem.

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  13. C'est ce qui s'appelle la sagesse ? Ce billet m'a rappelé, en ce qui me concerne, le passage des "je dois..." aux "je peux... si je veux...".

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  14. Je lis - avec délices - les commentaires, et oui, qu'est-ce qu'on a pu nous gâcher de petites joies avec ces recommendations acides qui les accompagnaient.

    Moi, qui ne me trouvais pas bien belle mais adorais avoir des tresses "comme une Indienne", je me faisais alors de grands sourires de squaw dans le miroir. Ne te regarde pas comme ça, disais ma mère, le diable va venir. Oups!

    Mais ça n'a pas empêché le présent de venir se faire apprécier... après que les années de joies teintées de remords se fussent passées!

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  15. Moi aussi, j'ai lu avec beaucoup d'intérêt vos différents commentaires...
    Même les plus jeunes d'entre nous doivent faire face à cette éducation qui nous a (trop) souvent empêché(e)s d'être simplement heureux de qui nous sommes, heureux de l'instant présent...
    J'ai souri en lisant les anecdotes que racontent certaines d'entre vous... (Le Creuset et Edmée) Souri jaune plutôt;-((

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  16. Je ne sais pas si ça vient de mon éducation mais j'ai évidemment un mal fou moi aussi à être heureuse sans culpabiliser "parce que le monde souffre tant". Et si j'arrive enfin à ne pas culpabiliser, je culpabilise 10 minutes plus tard de ne pas avoir culpabilisé. Oui, je sais. Pour l'instant, j'ai trouvé deux "solutions", mais aucune ne me convient.

    Par contre, je fais mon petit chemin sur le coté "s'il fait beau aujourd'hui, c'est qu'il pleuvra demain". J'apprends peu à peu la confiance (mais bon, si on n'a pas confiance de ce coté là en pleine "lune de miel", quand est-ce qu'on aura confiance, hein:))

    Contente moi aussi de te relire après ces trois semaines d'absence.

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  17. Et bien chapeau Coumarine.
    J'ai beau savoir, lire, écouter, pratiquer, me permettre même de conseiller.. je n'y arrive pas.

    Je n'y arrive vraiment pas. Et toujours les nuages gris reviennent.

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  18. Vous savez... parfois j'ai beau "lire, écouter, pratiquer, me permettre même de conseiller"... je n'y arrive pas non plus.
    Il y a des jours avec, des jours sans..
    Et il m'arrive encore de douter et d'être parfaitement incapable d'être positive.
    Les nuages gris reviennent toujours...
    Mais c'est ça la vie finalement...;-))

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  19. Bonjour Coumarine. me voilà de retour .Et je te lis.Je crois qu'avoir une mère heureuse, donne des enfants heureux...
    J'ai connu enfant, une mère qui chantait en s'occupant de ses bébés, en rangeant le linge dans les armoires...
    Je me disais: quand je serai grande je ferai comme maman!
    C'est une grande chance que d'avoir eu une enfance joyeuse avec plein de frères et soeurs.
    Cela permet d'avoir presqu'automatiquement le reflexe de faire des prohéties heureuses.
    Bonne chance à toi dans ton projet qui a l'air de bien avancer.Je suis sûre que ce sera réussi.

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  20. @Charlotte je te lis et j'ai des larmes aux yeux
    Ma mère était profondément dépressive.
    J'ai dû lutter pour voir la vie de manière positive
    Heureusement que j'ai un tempérament combatif
    Heureusement...

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  21. Ton "autre histoire" est sûrement une belle histoire.

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