dimanche 25 novembre 2018

les enfants en Suisse 3

Je n'avais pas prévu d'aller aujourd'hui déjà, jusqu'au bout de mon histoire
Mais une certaine urgence m'y conduit, malgré moi...

Ma grand mère qui a confié ses enfants si jeunes à deux familles suisses n'a pas eu une vie heureuse/ mon livre "L'enfant à l'endroit, l'enfant à l'envers" est un dialogue avec elle, que j'ai imaginé sur base de certains faits réels.

Cette grand mère est morte à 42 ans, d'une maladie mystérieuse que j'ai pensé être un cancer des os: alitée, elle ne pouvait plus marcher.

C'est ma mère à peine adolescente, qui s'est occupée d'elle pendant ses années de maladie (combien? je ne sais!).  Et c'est elle aussi qui lui a tenu la main le soir où elle est morte: elle n'avait que 16 ans!

Je récapitule: partie en Suisse alors qu'elle avait 4 ans, rentrée 6 ans plus tard le coeur déchiré, dans sa  vraie famille qu'il lui a fallu réapprendre à connaitre, puis quelques années pour s'intégrer (la langue, le Néerlandais  qu'elle ne connaissait pas, l'école bien plus sévère qu'en Suisse, un père autoritaire qui ne lui donnait aucune permission de liberté etc). Ensuite très vite ses années de garde malade auprès d'une mère gravement malade.
Quand elle est morte, son père s'est remarié avec une femme bien plus jeune.  Le bonheur était censé revenir dans cette famille sauf que....
Il n'a pas attendu pour se remarier, six mois seulement après la mort de sa première femme!

Ma mère et son frère ont été OBLIGES d'appeler cette femme inconnue "Maman": c'est quasi la seule confidence que ma mère m'ait faite, elle ne supportait pas d'appeler sa belle mère de cette façon!
Son père, très autoritaire ne lui a pas laissé le temps de faire son deuil. Elle en a énormément souffert! Je suppose qu'elle s'arrangeait pour n'avoir pas à prononcer ce mot de Maman!

Depuis que j'ai appris l'épisode de la Suisse, je me sens très bouleversée, mon corps aussi a encaissé cette nouvelle de manière "bouleversée". Mais une immense compassion a fait place dans mon coeur pour cette mère que j'ai si peu aimée! et qui m'a si mal aimée aussi, il faut le dire!
Oui j'ai rempli mon devoir de fille surtout dans les dernières années de sa vie, mais nous n'avons jamais eu de moments de partages tendres et confiants, comme je peux en avoir avec mes filles aujourd’hui.

Et c'est si dommage....

A leur tour mes parents ont décidé de se séparer de moi, j'avais 4 ans: je souffrais d'asthme et le médecin pensait que le grand air me ferait le plus grand bien. Je n'ai aucun souvenir de cette période de séparation et ne sais si j'en ai spécialement souffert: dans mon livre je dis que oui, parce que c'est ce qui semble le plus évident (encore une fois pas encore Dolto, donc aucune explication qui aurait pu me faire comprendre, et accepter cette situation!
Ce que je remarque, c'est qu'il y a dans mes gênes une "séparation" programmée d'avec mes proches, spécialement d'avec ma mère. Pas étonnant que j'ai toujours besoin d'être rassurée au sujet de l'amour de ceux que j'aime...

Dans ce domaine-là j'ai dû apprendre la résilience et ne plus me situer en mendiante d'amour
Petit à petit j'y arrive, peut-être même que j'y suis arrivée... mais quel chemin...!


38 commentaires:

  1. mendiante d'amour, quelle juste formule!
    reconnaissable, donc très juste ;-)
    bises, Coumarine, merci pour ce beau témoignage.

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  2. Mais on est toujours "mendiant d'amour' !
    Tout bêtement parce qu'on n'en a jamais assez.
    ou jamais le bon, ou jamais celui qui faut ou pas au bon moment...
    Mais jamais assez.
    Et puis on grandit.
    Et je pense qu'on est "grand" quand on a pardonné à ses parents.
    (souvent parce qu'on constate qu'on fait comme eux : ce qu'on peut avec ce qu'on a et qu'on espère que c'est bien... ;-) )

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    1. Je dirais plutôt qu'on est grand quand on se libère du regard de ses parents, d'un éventuel jugement, autrement dit quand on est libre, autonome dans sa tête, quel que soit son choix de vie.

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    2. à Le Gout, j'ai pardonné à ma mère quand j'ai su qu'elle était fortement dépressive... et encore plus ces derniers jours, quand la compassion pour l'enfant qu'elle était m'a envahie, littéralement!

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    3. La Balladine,tu as raison... se libérer du regard de ses parents, et après eux de tous les "parents" dont on a peur de ne pas être conforme!

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    4. On a "pardonné à ses parents" quand on a compris qu'ils nous jugeaient sur nos actes et que c'était dicté certes avec des préjugés, des maladresses, parfois de la méchanceté (on n'a pas été fabriqué par des anges ni des saints) mais avant tout "pour notre bien" même si la notion de "bien" divergeait souvent de la nôtre... ;-)

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  3. Bonjour Coum,
    ton histoire est bouleversante. Bien des similitudes avec ma propre histoire (je pense que tu l'as compris).
    Le commentaire du Goût me fait penser à cette citation d'Oscar Wilde : "Les enfants commencent par aimer leurs parents; devenus grands, ils les jugent; quelquefois, ils leur pardonnent.”
    J'espère que l'urgence dont tu parles ne recouvre pas de caractère grave..
    Merci pour ce récit, Coum

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    1. j'ai aimé ton regard attentif, chère Ambre, je me suis sentie comprise!

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  4. Connaître l'histoire de ses parents permet de comprendre, accepter et pardonner.

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    1. oui Suzame, ce ne fut pas si évident pour moi, mais je progresse dans ce sens, courageusement!

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  5. Ma mère, aussi, avait la fâcheuse tendance, de nous envoyer ma sœur et moi dans des endroits étranges, ma petite sœur a échappé à ça.

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  6. Suzanne a raison ....même si il est difficile parfois de connaître l'histoire...Quand a pardonné .... Je m'étonne toujours de cet éternel recommencement dans les familles...

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    1. Bonjour Manou, je me demande si cet "éternel recommencement dans les familles" n'est pas une opportunité qui est offerte de rejouer la scène jusqu'à ce que la fin soit différente.... (en mieux ;-))
      Belle journée à tous

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    2. Ambre, tu mets le doigt sur quelque chose de TRES important et que j'ai mis du temps à admettre et à comprendre:rejouer la scène jusqu'à ce que la fin soit différente...

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  7. A la lumière de la vérité, le fil de l'histoire se déroule et tout se met à "faire sens"...
    Baiser doux

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  8. C'est toujours une étape importante de renouer un ou des fils distendus dans sa parentèle.
    La véritable autonomie humaine c'est d'être à la fois libre et proche dans la relation. C'est vrai entre vivant, c'est vrai entre soi et nos disparus.
    On ne peut pas être proche si on a encore des « comptes à rendre »
    il semble que tu avances ainsi vers la véritable pacification.

    Quant au besoin d'être aimé, il est vital pour tout être humain. Et ceci jusqu'à son dernier souffle.
    Abandonner la terminologie « mendiante », c'est peut-être le signe que l'on a suffisamment « la dose d'amour nécessaire » et qu'on a confiance et conscience qu'elle ne sera plus carencée, et que notre terre intérieure est suffisamment constituée d'un humus humidifié, pour supporter quelques temps de sécheresse.
    Autrement dit plus de mendicité mais un partage « aimer/être aimé » fécond.
    Ce qui ne veut pas dire que tout devient parfait !

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    1. non! tout ne devient pas parfait, loin de là! Il suffit d'être "malmenée" par la vie, et les anciens démons resurgissent. Je ne veux pas glisser dans une espèce d'indifférence qui me permettrait de ne plus souffrir

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  9. Ta maman a dû bien souffrir, ce qui explique certainement cette dureté qui était sûrement une façon de se protéger. Et toi, tu en as souffert, tu aurais aimé plus d'amour, mais elle était incapable de t'en donner. Je pense, que tous, autant que nous sommes, ne pouvons blâmer l'autre (oui, je sais...) car nous ne connaissons pas tout de leur histoire. Pardonner est la meilleure chose que nous puissions faire.
    Ton récit me parle beaucoup, Coumarine. Merci beaucoup pour ce partage.
    Je t'embrasse fort.

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    1. merci chère Françoise. Je me demandais vu le nombre réduit de commentaires, si j'avais bien fait de m'ouvrir de cette façon!

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  10. Tout cela est bien triste. Un manque d'amour laisse des traces indélébiles et une grande fragilité. J'ai vécu cela avec ma mère qui avait été abandonnée par ses parents. Son traumatisme s'est reporté sur moi et nos relations ont été très difficiles. Bon courage à toi. La vie est aussi faite pour se reconstruire. On en sort plus fort.

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    1. " Son traumatisme s'est reporté sur moi et nos relations ont été très difficiles."
      Voilà! c'est exactement ça. Merci Cher Daniel

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  11. Etre séparée de sa mère est toujours douloureux pour des enfants et encore plus dans ce contexte de guerre. Etre séparé de ses enfants est aussi très douloureux pour une mère.Quand une fois par an mon père et ma mère partaient en vacances rien qu'à eux deux, c'était un déchirement pour moi. Je décomptais les jours qui me séparaient d'elle d'autant plus que nous étions gardés alors par les deux soeurs célibataires de ma mère. Elles étaient assez sé vères mais je me faisais très sage et obéissantes car je savais qu'elles diraient à ma mère à son retour que j'avais été LA PLUS SAGE!

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    1. C'était la façon que tu avais trouvée pour te faire accepter, aimer et préférer par ta mère: pas bête forcément!

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    2. Non, je me savais aimée de ma mère.

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    3. Je suppose que tu sais que c'est une grand chance d'avoir su que tu étais aimée? En fait cela change tout, on peut fondamentalement faire confiance en la vie

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  12. Bonjour Coum, je suis venue lire tous les commentaires et tes réponses. Belle journée à toi et à tes visiteurs et amis.

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  13. Je suis arrivée après la bataille mais je m'inscris dans les réactions évoquées ici.
    On ne s'embarrassait pas trop de psychologie à une époque. les enfants étaient rudement malmenés, et on s'étonne qu'adultes ils aient fait des dépressions..
    Mendier l'amour, je connais cela... tu as raison, c'est un long chemin pour sortir de la dépendance affective. Et une vigilance de chaque instant.
    Mais ça vaut le coup. Vraiment. Et je sais que tu le sais.
    ♥︎

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    1. nous avons publié un commentaire en même temps, Célestine
      Commentaire pour lequel je te remercie de tout coeur!

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    2. Belle synchronicité !
      •.¸¸.•*`*•.¸¸☆

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  14. Je voudrais juste ajouter que d'avoir appris cet épisode m'a passablement bouleversée:j'ai profondément compris le mal-être de ma mère, que j'ai eu tendance à juger
    Hélas elle n'a rencontrée aucun psychologue, aucune aide qui aurait pu l'aider à mettre des mots sur sa détresse, d'autant plus qu'elle lui était interdite par son père, qui ne voulait plus entendre parler de sa jeune femme décédée!
    Merci à vous tous d'être venu.e.s me lire!

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  15. Bonjour Coum,
    on a tous, je crois, "tendance à juger" nos parents, ou l'un de nos parents... bien sévèrement la plupart du temps... et souvent, c'est l'avancée en âge et la compréhension de certaines choses qui nous fait enfin comprendre et devenir plus tolérants. Peut être est-ce une étape "obligatoire", ou un contexte de société, mais ça ne sert à rien de s'en vouloir, c'est comme ça... voilà.
    Peut-être que si elle avait rencontré un psychologue, ça n'aurait rien changé du tout. Tu sais bien qu'à l'époque de nos mères, "on ne s'écoutait pas". On ne parlait pas des choses qui font mal, ces choses faisaient partie de la vie et il y avait toujours pire ailleurs.
    Je comprends que tu aies été bouleversée, je l'ai été, moi aussi, en lisant les lettres que mes parents ont échangé alors que j'étais toute petite (ma mère m'a légué ces lettres, imagine la symbolique!) et où j'ai appris, compris tant de choses.
    C'est important cette réconciliation (j'appelle ça comme ça) que tu as pu renouer avec ta maman. Tu vas voir, le choc passé, ça va te faire un bien fou.
    Belle journée à toi

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  16. Ce qui me frappe c'est que longtemps après leur mort, il y a des mères qui se rapprochent, ou que nous rapprochons, justement en comprenant de petites choses qui furent leurs drames. Et on arrive à "pardonner" parce qu'on comprend. J'avais beaucoup aimé ton libre, pour moi il allait déjà très nettement vers l'amour...

    BIses, Coumarine!

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