- Qu'est-ce que vous racontez là?
- Un conte.
- Ce n'est donc pas une histoire vraie.
- Pourquoi?
- Ce n'est pas vraiment arrivé.
- Mais si.
- Alors, Le Petit Chaperon Rouge?
- C'est une histoire vraie.
- Comment le savez-vous?
- C'était moi. J'ai eu très peur.
Eugène Guillevic
Relisant ce petit conte ce matin, je me dis que c'est ça, tout à fait ça!
Un récit de fiction dit la vérité.
La vérité de celui qui l'a écrit
La vérité de celui qui la lit (différente pour chaque lecteur, c'est ça qui est fabuleux!)
Mon amie Evelyne Wilwert quand elle a écrit Papillon mortel, a eu des moments d'émotion intense.
Moi-même quand j'écris certains textes, je suis remuée au plus profond.
Il ne sert à rien de s'installer à son clavier et d'écrire avec sa tête, des intrigues savamment construites.
C'est important certes, mais ce n'est pas tout, loin de là!
Les personnages, il faut les voir vivre...les accompagner...
Et puis il est important de tenir compte des forces chaotiques qu'il y a en nous, de leur permettre de surgir en mots "vrais", qui "font peur", qui émeuvent, dans lesquels on se reconnaît
Alors une vraie connivence s'installe entre auteur et lecteur...
"C'était moi. J'ai eu très peur..."
Dessin pris sur le Net
Je pense qu'avoir très peur fait "sortir le loup du bois". On doit pouvoir libérer des émotions houleuses dans ce qu'on écrit, parce que les choses qui font bouger notre vie - et donc un récit ou un roman - ce sont les sentiments intenses. Il faut donc oser et savoir les exposer.
RépondreSupprimerCe livre a l'air bien tentant!!!
coucou Edmée...ma fidèle première commentatrice!
RépondreSupprimerJe suppose que tu parles du roman Papillon mortel?
Il va être difficile à trouver là où tu vis ;-((
Sauf si éventuellement tu t'adresses à l'éditeur (belge) Luce Wilquin...
Pourquoi ai-je immédiatement pensé à Rimbaud et au Dormeur du Val en découvrant le dessin ? Pourquoi est ce que je refuse que ce texte de Guillevic me parle ? Pourquoi est ce que je l'évite ?
RépondreSupprimer"tenir compte des forces chaotiques qu'il y a en nous" voilà une face que j'ai besoin d'approcher mais je ne sais pas nager, j'ai peur d'être engloutie, aspirée. Je ne porte pas de rouge pourtant.
Contente que Guillevic vous ait inspirée. Je dirais que notre côté chaotique est ce qu'il y a de plus intéressant et passionnant à essayer de faire émerger en nous, chez les autres(même si on n'écrit pas).
RépondreSupprimerÇa "chamboule", mais on peut en rire aussi, non?
@nicole.. que te dire?
RépondreSupprimersurtout si tu n'aimes pas trop voir en face combien ce petit texte de rien du tout te parle...
Tu sais, en le lisant j'ai reçu comme un petit choc: oui, c'était bien moi qui ai souffert (et même pleuré) quand j'ai écrit L'enfant en introduisant pourtant des éléments de fiction greffé sur un récit de vie!
Lesquels donc? Je sais et je ne sais pas (plus). et pourtant///Ce poème de Guillevic pour les enfants m'a parlé énormément
(je crois qu'on a toujours peur de se faire engloutir...tu ne crois pas...?
@Colo, j'aime énormément Guillevic. En quelques mots il assène une vérité qui me laisse pantoise!
(au fond c'est très vrai aussi ce que vous dites: ça chamboule, mais on peut en rire...
C'est un secret, je crois, un secret de bonne santé...
Oui. Je comprends l'émotion à écrire de drôles d'histoires pas tout à fait vraies,( sont-elles crédibles ? ) , mais pas entièrement fausses car elles résonnent en nous, au moment où on les écrit et quand elles sont lues. J'aime cette équilibre devant un texte, est-ce du vécu, où s'arrête la fiction et où commence le récit. J'aime cette ambiguïté.
RépondreSupprimerTant pis pour le "TE" en trop.
RépondreSupprimersouvent je me suis demandé comment les femmes vivaient cette histoire du Petit chaperon rouge.
RépondreSupprimerComment elles y voyaient leur histoire initiatique de petite-fille qui devient femme.
Tout dépend sans doute des versions qu'on a pu lire...
Je crois que tu donnes la clé de tout beau texte: celui écrit avec émotion et avec ses mots propres. (et du talent en plus bien sûr!)
RépondreSupprimerPas encore de lectures effectives parmi mes proches mais c'est en cours... une grande reconnaissance et beaucoup d'émotion en tout cas. Merci pour ta disponibilité.
Cette vérité de chaque artiste, écrivain, conteur, poète, peintre, sculpteur, photographe...
RépondreSupprimerUn joli petit conte !
Bjr Coumarine, enfant j'appréciais les contes et les poèmes mais je ne croyais pas que c'était vrai! C'étaient seulement de jolies histoires que les adultes nous racontaient pour nous bercer et pour nous montrer parfois qu'il y avait les gentils et le méchant loup...puis le temps passe et aujourd'hui les mots d'un poème qui me parlent, une musique que j'écoute attentivement ou bien les deux à la fois me font pleurer...il m'aura fallu donc toutes ces années pour réveiller en moi cette forme de sensibilité et voir dans les contes, les poèmes, les mots, une part de vérité tout en admettant que chacun puisse y voir ce qui le touche, ce qu'il veut y voir vraiment par rapport à sa propre histoire, à son ressenti...être touché en plein coeur, voilà ce qui est bon et qui peut venir naturellement, sans se forcer à vouloir à tout prix interpréter ce que l'écrivain a écrit à un moment donné de sa vie. Je ne sais pas d'ailleurs si ce que j'écris est explicite mais je me comprends! Bonne journée!
RépondreSupprimerJ'aime bien le thème de ton billet, il fait écho à un texte que je viens de terminer et qui parle du vrai et du faux qui apparaît dans toutes les histoires.
RépondreSupprimeroh oui! combien de fois ai-je eu peur moi-même alors que je lisais ce conte à mes enfants!
RépondreSupprimerL'histoire d'un conte raconte quelque chose qui n'existe pas. Mais du moment qu'elle est écrite et racontée, elle devient vivante, donc réelle. Quelque chose comme ça.
RépondreSupprimerEncore touchée, Coum ... Chaque vérité est vraie, chaque vérité est différente, avec ou sans fantômes... c'est ce qui fait en grande partie la richesse d'un peuple, sa beauté, sa couleur... @+
RépondreSupprimerTrès juste !
RépondreSupprimerMais parfois cela remue pas mal le ventre hein ?
... et verser des larmes de joie ou de tristesse ! ;D
RépondreSupprimerDepuis que je suis devenue grand mère... mon rêve c'est de dévorer(ou d'être dévorée par) un beau grand loup!
RépondreSupprimer@Berthoise...oui tu exprimes bien cette ambiguïté, je la vis comme ça aussi...
RépondreSupprimer@Alain.. AM Garat a écrit un essai psychanalytique sur l'histoire du chaperon rouge
"une faim de loup". Je l'ai dévoré il y a déjà un certain temps...et je ne me rappelle plus du contenu ;-(
Pour moi, c'est clair l'histoire du chaperon s'apparente à un viol, c'est toujours comme ça que je l'ai perçu
@Delphine... l'émotion est partie prenante et sans doute la plus importante de tout récit qui touche, je le crois sincèrement..
@Naline... je crois que tu connais Guillevic, non? il me semble que tu l'as déjà cité sur ton blog...
@Josiane, oui oui tu te fais très bien comprendre et je te rejoins très fort: aujourd'hui un conte peut nous toucher par son sens métaphorique
A condition d'avoir gardé un cœur d'enfant
@fabeli... ah! je serai curieuse de lire ton texte...;-))
RépondreSupprimer@marie-madeleine... tu te laissais prendre par l'émotion que le conte véhicule...
@Damien... vivante et réelle, car racontée avec sensibilité...oui, c'est qqch comme ça!
@Magel... tu sais que je suis contente de te revoir ici? Oui chaque vérité, quoique personnelle, donc différente, est vraie!
@Fauvette.. tu l'as dit ça remue le ventre, ça oui!
@Charlotte... mais D. n'est-il pas un beau grand loup?
Coumarine tu réponds : "Pour moi, c'est clair l'histoire du chaperon s'apparente à un viol, c'est toujours comme ça que je l'ai perçu"
RépondreSupprimerCe qui est intéressant, c'est de s'interroger sur le pourquoi de l'interprétation que l'on donne, ce que cela nous apprend sur nous-mêmes.
(Car cette interprétation du viol en est une parmi bien d'autres...)
@Alain... par curiosité suis allée relire le thème du livre d'Anne-Marie Garat que j'ai évoqué
RépondreSupprimerJe me souvenais avoir DEVORE ce livre (le terme n'est pas trop fort) tellement son interprétation me parlait
Je mets quelques mots à ce sujet
"Sollicitant la psychanalyse, l'étymologie, l'histoire littéraire et l'histoire tout court, Anne-Marie Garat propose une interprétation inédite du plus célèbre conte de Perrault. Pour elle, 'Le Petit Chaperon Rouge', qui met en scène trois générations de femmes et exclut toute figure paternelle, relate l'histoire de la passion carnassière unissant les mères à leurs filles et le processus de transmission de l'obscur objet du désir féminin: l'enfant. Et telle serait la véritable morale de l'histoire : un amour maternel abusif et mal canalisé est monstrueux et destructeur, aussi bien pour les mères que pour leurs filles."
Trois générations de femmes, en relisant ça, je me suis sentie secouée... très
J'aurais envie d'écrire à ce sujet
Mais pas l'impression qu'ici cela me soit "permis"
Je verrai...
Et puis oui, c'est vrai, il y a l'interprétation que moi j'en donnais: le viol ou plus exactement encore l'inceste...
bonjour Coumarine, sur ce sujet, il a tout un texte dans le très passionnant livre D'Yvonne Verdier : Façon de dire, façon de faire, et le thème est très bien abordé aussi sur le site de la BNF. Quant aux contes, il y a toujours un endroit où tout y est vrai. Mais il est inutile de le chercher. C'est lui qui nous trouve.
RépondreSupprimerPour le rapport fille, mère, grand mère, il y a le très beau, très fort et très inspiré spectacle de Joël Pommerat, qui s'appelle tout simplement : Le petit chaperon rouge. Une merveille pour tous les publics (pas les trop petits, ça fait PEUR)