mercredi 14 mars 2018

Professeurs de désespoir

Hier La Baladine a posé sur mon blog un commentaire très intéressent: le voici
"Je ne peux pas m'empêcher de me demander ce qui pousse tant d'imagination vers des choses tragiques... C'est vrai, quand on raconte une belle histoire gaie, tout le monde va dire "oui c'est gentil/naïf/bêta/mode bisounours" alors que si l'histoire se termine mal, tout le monde adhère!"


Je pense qu'on ne peut raconter une histoire qu'en étant au plus près de la vie. Et cette vie est faite de beau et de bon, de tendre et de soleil, mais aussi hélas de tragique, de détresse, d'orages et cela ne finit pas toujours très bien, loin de là! Hélas!
Mettre en scène des personnages qui, dans leurs difficultés, vivent ou tentent de vivre la résilience, n'y arrivent pas forcément, mais recommencent, ne perdent pas espoir...et continuent la lutte, 
cela ne peut que toucher les lecteurs qui peuvent reconnaître leur propre combat.
Et ces histoires peuvent énormément émouvoir
Mais un écrivain qui écrit systématiquement des histoires tristes, dans le désespoir le plus absolu, je crois qu'il faudrait qu'il s'interroge sur sa "nécessité" de ne pas quitter le morbide: quel plaisir cela lui procure-t-il? qui a-t-il en lui de si blessé pour qu'il ne puisse quitter le cycle infernal du sombre? 

Je crois que c'est pour ça que les lecteurs ont besoin que "cela" finisse bien" et se sentent frustrés quand ce n'est pas le cas
A lire  "Professeur de désespoir" de Nancy Huston
"Nous devenons schizos, mes amis. Dans le quotidien, nous tenons les uns aux autres, suivons l'actualité avec inquiétude, faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour préserver et renforcer les liens. En tant que lecteurs ou spectateurs, au contraire, nous encensons les chantres du néant, prônons une sexualité aussi exhibitionniste que stérile, et écoutons en boucle la litanie des turpitudes humaines. A quoi est dû cet écart grandissant, à l'orée du XXIe siècle, entre ce que nous avons envie de vivre (solidarité-générosité-démocratie) et ce que nous avons envie de consommer comme culture (transgression-violence-solitude-désespoir) ? " L'homme est bon et mauvais, disait George Sand. Mais il est quelque chose encore : la nuance, la nuance qui est pour moi le but de l'art. " La littérature contemporaine aurait-elle renoncé, à ce but-là ?" N. Houston
(à suivre)

"soyez abjects, vous serez vrais" prône Houellebecq...

18 commentaires:

  1. C'est sans doute que la littérature dite moderne (celle qui se vend) a probablement dévoyé le sens profond de la tragédie. Je veux dire la vraie. Pas les drames de l'existence de tout un chacun.
    Je parle des classiques comme Phèdre, le Cid, Antigone, ( surtout l'Antigone d'Anouilh), etc.

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  2. Pour ma part je trouve la vie parfois suffisamment lourde que je préfère les histoires légères qui se terminent bien.

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  3. Je crois aussi que c'est le désir d'être lucide qui nous fait réagir ainsi...Regarder les problèmesen face est la seule façon de pouvoir les résoudre!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!; !je connais autour de moi des personnes qui, dès que la réalité leur paraît trop lourde préfère la nier et faire comme si elle n'existait pas...S'ils sont parfois angoissés , ce sera toujours pour des choses insignifiantes, là ils peuvent se leurrer et tenter de se montrer efficaces...Mais il est vrai aussi que de toujours voir le drame partout est profondément déprimant...Il nous faut être lucides mais aussi optimistes et toujours soucieux de voir et d'admirer ce qui favorise la Vie

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  4. J'adore Nancy Huston! Elle dit qu'il n'y avait rien de plus difficile que d'écrire sur le bonheur. Et elle aime la vie!
    Je ne sais pas si nous sommes atteints de schizophrénie, mais je constate souvent autour de moi que ceux qui ne sont pas malheureux pour des raisons qui échappent à leur contrôle cherchent et trouvent un moyen de se rendre malheureux tout seuls...
    Ce qui est certain, c'est que le bonheur n'a la cote ni en art, ni en littérature.

    Je vais prendre un exemple tout bête: un enquiquineur veut absolument te voir. Pour l'éviter, tu lui dis:
    a/ ça ne va pas être possible, j'ai trop envie de bouquiner tranquille en grignotant des sablés trempés dans du chocolat chaud.
    b/ça ne va pas être possible, j'ai trop de feux d'artifice de plaisir en retard de la semaine dernière.
    c/ ça ne va pas être possible, j'ai trop de travail en retard de la semaine dernière.
    Honnêtement?

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    1. Pas plus tard qu'il y a huit jours, je publie un texte sur le bonheur : on me reproche, vertement, que je fais offense à tous les malheureux ( mais on préfère me l'écrire en privé plutôt que d'avoir le courage de le publier en commentaire)… Ou alors que je fais dans le lieu commun…Faudrait savoir !


      La prochaine fois je fais un texte sur l'étalage des misères du monde en 25 pages… au moins ça plaira… je vais exploser mon lectorat !
      C'est vrai après tout : on est fait pour souffrir sinon on n'ira pas au paradis ! Et moi j'ai toujours cru ce que le pape et les évêques disaient… puisqu'ils détiennent la Vérité.
      Tiens, aujourd'hui je vais essayer d'être malheureux comme la pluie. Je ne garantis pas d'y arriver, mais je vais essayer…

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    2. Je dirai qu'ON n'est pas bien malin, ni courageux, et tu remarqueras que souvent ça va de pair.
      Ça nous vient de loin, ce culte du malheur!
      Tiens: "on ne fait pas de littérature avec de bons sentiments" "une œuvre d'art est un monceau de cicatrices", ou ce vers de Musset que citait Célestine il y a peu" les plus désespérés sont les chants les plus beaux, et j'en sais d'immortels qui sont de purs sanglots". On va lui ajouter, tant qu'on y est: "il faut souffrir pour être belle", et en ajoutant la religion, effectivement, on aura fait le tour. Tout va mal donc tout va bien!
      Malheureux comme la pluie? Tu oublies les pays où elle est une bénédiction ;-))

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  5. merci pour vos longs commentaires!
    j'ai passé beaucoup de temps aujourd’hui dans ce livre de Nancy Huston (que j'aime énormément aussi La Balladine!)
    Et j'ai oublié l'heure...
    Je voulais choisir un extrait pour illustrer ce qu'elle écrit au sujet de cette attirance pour les œuvres sombres jusqu'au désespoir!
    Elle est réaliste, mais pas "désespérée" comme les écrivains dont elle dénonce la noirceur voulue et même recherchée
    Ce bouquin est passionnant
    elle parle de Cioran, de Schopenhauer, Kundera, de Beckett, Houellebecq
    Ecrire sur les misères et les drames du monde, OK! Mais envelopper cela d'un sombrissime, de néant... donne au lecteur une nausée nauséabonde...

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    1. on a besoin de livres qui donnent du punch, même si cela passe par du polar... mais les livres qui donnent un gout de désespoir, c'est l'horreur

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  6. Tellement d'accord avec tout ce qui se dit ici.
    Il est dans la nature humaine de se rouler un peu dans la turpitude, le morbide, le crime, le sang...
    Et puis tout est fait pour que les gens heureux et sans histoire paraissent mièvres et ennuyeux.
    « faut qu'ça saigne ! » disait Chépluki.
    Tu sais maintenant que pour moi, dire les choses avec poésie ne signifie pas que je sois la « ravie de la crèche » loin s'en faut.
    Tu me donnes envie de lire Nancy Huston, dont tu avais déjà parlé.
    Il est des auteurs, comme Bobin, qui font du bien à l'âme.
    ¸¸.•*¨*• ☆

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  7. je te recommande la lecture de Nancy Huston, Célestine
    Je crois que tu pourrais l'aimer
    C'est une auteur prolixe, elle a écrit des romans et des essais, comme celui dont j'ai parlé ici
    Bonne lecture ;-)

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  8. Bonjour Madame,
    Tu te rappelles? Palmer.
    Eh oui! Y'a longtemps!
    Je vois que tu cours,marine,toujours.
    Mais tu es bien meilleure qu'avant. Vraiment.J'admire.

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    1. oh lala non, Palmer, me souviens plus trop, désolée
      je cours marine toujours en effet!!
      à bientôt?

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  9. Je te suis complètement, Coumarine...
    Une œuvre réussie est une œuvre qui, même si elle est sombre, laisse apparaître au final un peu de lumière...
    La lucidité, oui...le désespoir, non !
    Ou alors, on le garde pour soi, mais on n'en abreuve pas les autres...
    Jamais compris comment on pouvait parfois dépenser des millions pour faire des films d'une noirceur absolue, dont on sort en se sentant plus mal que quand on est arrivé !

    J'aime beaucoup Nancy Huston, j'ai lu quatre ou cinq de ses livres, mais tu me fais découvrir ce livre-là. Merci !

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    1. je te remercie aussi et je te rejoins dans ce que tu écris là!
      Je me suis replongée dans un autre de ses livres: des conférences qu'elle a données durant dix ans, sur des sujets divers et tous intéressants
      à découvrir
      https://www.babelio.com/livres/Huston-Carnets-de-lincarnation--Textes-choisis-2002-201/831487

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  10. "soyez abjects, vous serez vrais" prône Houellebecq..."

    C'est surtout que pour bon nombre, l'effort à faire sera maigre...

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    1. c'est terrible ce que tu écris là le gout...
      pour bon nombre, d'accord hélas... mais quand même pas pour tous!

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  11. Très intéressante cette réflexion . Oui, le goût du morbide, du sombre est si souvent étalé sur la blogosphère ! Le désespoir ambiant ... grrrr ... Alors sachez que perso je suis heureuse, optimiste, ravie ( comme le ravi de la crèche oui, oui ) et que je proclame la Joie et la Paix dans les chaumières !!! Je ne connais pas ce titre de Huston ; j'en ai lu d'autres jadis quand je lisais ... ;-) Bon dimanche à tous !

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  12. bonsoir et bienvenue Annick
    Il faut parfois décider d'être heureuse :-)
    Moi je fais de mon mieux, compte tenu des circonstances de ma vie, et parfois je ne vois pas les choses avec optimisme
    A bientôt!

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