mercredi 19 janvier 2011

Une femme à Berlin

Je lis en ce moment "Une femme à Berlin"
C'est le journal qu'une femme restée anonyme, a écrit du 20 avril au 22 juin 1945, dans sa ville dévastée par la guerre, dans laquelle les Russes victorieux sont entrés triomphants et brutaux.

(une question déchirante: pourquoi les vainqueurs des guerres se conduisent-ils la plupart du temps en animaux violeurs et ivres? Et brutaux? Est-ce là leur façon d'en imposer aux vaincus? de leur signifier qu'ils sont les maîtres? de leur faire payer les souffrances par lesquelles eux-mêmes sont passés?
Et pourquoi lors d'événements dramatiques (bombardements ou catastrophes naturelles) les autochtones ne pensent-ils qu'à piller magasins et maisons?
Fermons la parenthèse...)

Cette femme a donc subi cinq ans de guerre... du côté des Allemands...peu importe... les civils sont tous des victimes...
puis l'entrée des Russes dans Berlin et le moins qu'on puisse dire c'est que ce ne fut pas pour elle une partie de plaisir
Et donc que fait-elle pour tenir le coup? pour garder la maîtrise de sa vie intérieure, pour ne pas se dissoudre dans le désespoir et l'ignominie (violée plusieurs fois...)
Elle écrit...elle écrit énormément durant ces deux mois fatidiques, au jour le jour, parfois heure après heure...

254 pages 
Ça fait 40 pages par jour... sans doute bien plus puisqu'elle écrivait avec un stylo dans un cahier
C'est énorme!
Après on peut se demander si elle a continué à écrire... ou si elle a tout épuisé de son inspiration durant ces quelques jours si intenses et si sinistres...
On ne le saura pas puisqu'elle est restée anonyme.

Ce livre me parle beaucoup
Une de mes nouvelles aborde ce sujet: une Berlinoise a connu tout ce dont parle ce journal (que je n'avais pas lu quand j'ai écrit cette nouvelle). Après la guerre elle épouse le Français dont elle est tombée amoureuse. Il meurt très vite... elle élève son fils français (ou russe?) en France dans l'hostilité, sans dire à personne ce qu'elle a vécu. 



20 commentaires:

  1. Pour moi c'est vraiment un livre remarquable, qui va bien au-delà du très beau récit témoignage du côté des vaincus, une perspective que nous n'avons pas souvent. C'est aussi un livre sur la résilience, sur la résistance intérieure, sur les rapports hommes-femmes au-delà de la situation de crise dans lequel il a été écrit. Par certains côtés elle me fait penser à Etty Hillesum, aussi différentes ces deux femmes soient-elles.
    J'ai chroniqué ce bouquin ici: http://valclair.canalblog.com/archives/2008/03/16/8346021.html
    Depuis on a su qui elle était, elle a mené une carrière de journaliste et est décédée au début des années 2000, je ne sais plus quel était son nom. En tout cas elle n'a jamais semble-t-il réécrit sur cette période et sur son expérience, ça aurait été passionnant son regard à trente ou quarante ans de distance mais sans doute était-ce trop douloureux.

    RépondreSupprimer
  2. je lisais justement un article ces jours-ci qui expliquait que la chose était avérée de la manière la plus scientifique possible: écrire a un effet thérapeutique

    RépondreSupprimer
  3. Toutes les guerres abolissent les limites de la décence et de l'humanité.
    Berlin assiégée et canonnée, détruite par la plus grande offensive d'artillerie de tous les temps (plus de 15000 pièces encerclant la capitale du Reich), les orgues de Staline qui ne font pas entendre de musique douce, ces katiouchas qui vrillent les oreilles dans leur bourdonnement incessant.
    Une armée qui déferle et qui sur un champs de ruine va perpétrer des atrocités, vol, rapine, et ces viols insensés de plus de 100000 allemandes, berlinoises ou pas, cet abject et massif geste de terreur; combien de suicides et d'enfants du malheur ?
    Elles tairont cela longtemps, les autres armées sont elles indemnes de tout blâme ? Surement pas !
    Cette toute puissance dévastatrice qui fait main basse, prend et saisit tout ce qui est à sa portée, ces officiers qui ne contiennent plus l'ardeur de leurs troupes harrassées et ces vainqueurs horribles mais pas honteux.
    L'énormité des chiffres de la chute de Germania
    nous saisit d'effroi, quand j'eus connaissance de l'ampleur des forfaits commis, des vies souillées, ajoutant à la misère, à la faim, la peur qui conduisit ces proies à tenter de se soustraire à l'ogre russe.
    Il y eut certes des hommes plus justes et je crois savoir que le commandement militaire de la zone occupée fut tenue par une main à poigne, mais le mal était fait, les soudards de moujiks comme des routiers avaient dévasté le Brandebourg au nom d'un concerto macabre.

    RépondreSupprimer
  4. Il y a dans ce livre des mots clés que je n'aime pas (guerre, viol) sans doute une émanation de la petite fille qui est en moi et qui se bouche les yeux et les oreilles un peu bêtement...Je lis pourtant régulièrement des livres contenant ces mots, comme pour m'obliger à regarder la vérité en face, surmonter mes peurs, mes terreurs, mes nausées, comme pour me rendre plus forte, m'aguerrir, m'a- guérir?
    A cent pour cent d'accord avec cette phrase: écrire a un effet thérapeutique.
    Bises
    Célestine

    RépondreSupprimer
  5. Je n'ai pas encore trouvé le courage de lire ce témoignage. Il me semble avoir entendu que l'on avait su qui était l'auteure après sa mort, elle était journaliste. J'ai entendu cela au moment où la pièce tirée du livre a été jouée à Paris, avec Isabelle Carré.

    RépondreSupprimer
  6. @Valclair... merci pour le lien. Je suis allée te lire, ton article est très complet et hyper intéressant...
    Je ne suis qu'à la moitié du livre... mais je suis ébahie du nombre incroyable de pages que cette femme à écrit en deux mois de temps...

    @Adrienne, je le pense de plus en plus: oui! écrire a un effet thérapeutique, je suis persuadée qu'elle a tenu grâce à cette écriture quotidienne

    @thierry... tu donnes là des détails précis et horribles
    Heureusement (et je veux le croire avec toi) qu'il y eut des hommes justes aussi de ce côté...

    @Célestine... d'où vient ta "fuite" devant ces mots que l'on lit pourtant tous les jours ds les journaux?
    Peur d'affronter une réalité (hélas) qui te dérange trop sans doute...
    On aimerait oublier que cela existe...
    Mais peut-être qu'on s'aguerrit (dans le bon sens du mot) en affrontant la réalité, pas en la fuyant? ;-)

    @Aifelle... tu trouveras tôt ou tard le courage de lire ce témoignage important, de l'autre côté de la barrière... surtout toi, la lectrice qui fait découvrir tant de livres de tous genres...
    Merci pour les détails que tu donnes sur la vie d'après de cette personne..

    RépondreSupprimer
  7. Mais oui, dès les premières lignes de ton billet, j'ai pensé à ta nouvelle dans les Dessous de table! Du coup, mon cerveau commençait à disjoncter un peu, mais comment a-t-elle pu si elle ne le lit que maintenant? Ces coïncidences me fascinent toujours, c'est un peu dérisoire, mais c'est comme ça...

    RépondreSupprimer
  8. Oui, l'homme a toujours aimé enfoncer le plus faible, surtout "en masse"...C'est le fameux *vae victis* (malheur aux vaincus) des Romains.Ils n'ont pas, je crois, la notion d'être injustes, en faisant cela, comme si les vaincus avaient perdu leur qualité d'humain.
    Probablement aussi qu'il y a tout ce que tu dis aussi, une façon de se venger, et de leur faire payer ce qu'ils ont eux même souffert, de se défouler, quoi...Tout en affirmant leur supériorité.
    En cas de catastrophe naturelle, je dirais que la peur doit pas mal jouer, la peur de manquer, la peur de la faim. et puis, les magasins sont pillés, mais sait-on par qui ? peut-être par ceux qui avaient faim avant la catastrophe, et qui viennent se servir maintenant que c'est possible !
    Tu m'as donné envie de lire ce livre, qui fait partie de ceux vers lesquels je ne me tourne pas naturellement car jugés trop "potentiellement déprimants"

    RépondreSupprimer
  9. @mab...bonne lecture donc... ce n'est pas une lecture facile, mais pourtant "riche", elle nous en apprends bcp sur l'âme humaine...

    @Pascale... je n'avais pas lu ce livre en effet, avant d'écrire ma nouvelle. Mais je savais que lors de la "libération" de Berlin par les Russes, les femmes avaient passé de mauvais quarts d'heure. Je voulais ds cette nouvelle faire passer le message que le monde n'est pas manichéen, il n'y a pas d'un côté, les bons, de l'autre les mauvais...

    @sel... j'aime bien tout ce que tu dis...le fameux rappel du Vae Victis...
    Tu sais,moi non plus je ne me tourne pas spontanément vers ce type de livre... avec son témoignage bien douloureux. Mais il fait réfléchir (à lire d'ailleurs l'excellent billet que Valclair a consacré à ce livre voir plus haut son commentaire

    RépondreSupprimer
  10. Ecrire pour survivre , tout au moins maintenir la vie
    Je pense à tous les musiciens qui ont connu l'enfermement , la déportation privés de leur instrument , comment pouvaient ils survivre à ça ?

    J'espère que ta rencontre dédicace fut un succès , j'ai pensé à toi Coumarine

    RépondreSupprimer
  11. @Jeanne.. oui tout s'est merveilleusement bien passé. J'avais décidé de laisser couler librement les choses, et mon amie (qui m'interrogeait) a fait comme moi...
    Rien de rigide, rien d'artificiel... nous avons aimé ça!

    RépondreSupprimer
  12. Alors, comment çà s'est passé hier soir à l'Association des Ecrivains Belges?

    RépondreSupprimer
  13. J'ai été très impresionnée par ce livre et surtout l'auteur du livre: une femme qui a tout mon respect, mon admiration. Quelle force de vie et de caractère.
    J'apprécie bcp le comm de Valclair.

    RépondreSupprimer
  14. @Petit Belge...merci de ton intérêt...lis ce que j'en dis juste au dessus dans ma réponse à jeanne

    @charlotte... je ne suis qu'à la moitié du livre... et suis impressionnée en effet
    Il faut aller lire le billet que Valclair a consacré à ce livre et dont il donne la référence dans son commentaire...

    RépondreSupprimer
  15. Bonjour,
    je me souviens avoir entendu parler de ce livre lors d'une émission à France culture, ce n'est pas le genre de littérature vers laquelle je suis attiré habituellement. Or, en feuillant des livres chez un libraire,paf! Je tombe dessus et bing! Je suis sous le choc, sous le charme, sous l'empreinte indélèbile. Comme quoi, il ne faut pas se dire "c'est pas le genre de littérature que...", amicalement, Ibara

    RépondreSupprimer
  16. Tragédie de la guerre. Indiscible cruauté qui à jamais brise des vies. Et il en ressort des écrits tellement bouleversants. Je n'ai pas lu celui-ci. Je pense à Etty Hillesum entre autres, comme à Anne Franck et bien d'autres.
    Merci pour cette idée de lecture !

    RépondreSupprimer
  17. @Ibara... ce livre me touche très fort aussi... Non c'est vrai, il ne faut jamais porter un jugement trop rapide sur les choses et les êtres

    @Naline... Comme Valclair, je pense aussi à Etty Hillesum en lisant ce livre...
    C'est un récit bouleversant, oui!

    RépondreSupprimer
  18. J'avais écrit jeudi mais mon message a encore disparu !ç

    bonjour Coumarine, juste pour dire que j'avais entendu à la radio un journaliste parler de ce livre et cela m'a donné envie de le lire, alors je l'ai acheté mais pas encore lu ; je donnerai plus tard mon ressenti mais j'ai hâte de le commencer en lisant ton commentaire et celui de tes amis.

    bonne journée à toi

    RépondreSupprimer
  19. @loulotte... tu n'es pas la première à dire que tes commentaires disparaissent!
    Ça me désole...
    Oui lis ce livre... il est "fort"

    RépondreSupprimer

un petit mot à dire?